Quelques-uns des problèmes auxquels nous avons dû faire face au cours de ce voyage.
- La commande d’inverseur bloquée lors de la mise à l’eau
- Les mâts qui se promènent
- La fuite de gasoil
- Un panneau de voile endommagé
La commande d’inverseur bloquée lors de la mise à l’eau :
Tout est prêt en ce beau matin du 22 août.
Hier, l’équipage s’est retrouvé au complet, les présentations ont été faites (Eric ne connaissait pas encore Christian ni Bruno), et les derniers préparatifs menés à bien. Christian et Bruno se sont chargés de l’avitaillement, Eric et moi avons échappé à cette corvée en préparant les voiles, les pare-battages, les amarres, etc.
Le soir, nous sommes allés au restaurant « Côté Nord » à Rochefort, et après notre première nuit à bord (mais à terre), la remorque hydraulique du port descend délicatement Paradox sur la cale de mise à l’eau.
Comme d’habitude, Pierre ne doit libérer le bateau que lorsque je lui signalerai que tout est OK : le moteur démarré, le retour du refroidissement contrôlé. C’est une procédure bien rôdée.
Or, cette fois, si le moteur démarre sans souci, la commande de l’inverseur reste bloquée au point mort.
Petit moment de panique ! Les planchers sont vite retirés pour avoir accès au moteur et à l’inverseur. Nous essayons de le manœuvrer à la main, mais rien à faire. Pierre, sur le tracteur de la remorque, va commencer à s’impatienter.
J’imagine déjà le pire, une casse à l’intérieur de l’inverseur, mais par acquis de conscience, nous mettons en œuvre un principe fondamental de l’art de la mécanique et donnons quelques coups de marteau sur la biellette de commande. Elle a l’air de bouger. Les coups de marteau se font plus convaincants, la bombe de dégrippant est mise à contribution et finalement, la commande de l’inverseur redevient coopérante.
Leçon retenue pour la prochaine navigation : contrôler le bon fonctionnement de l’inverseur avant la mise à l’eau !
Dimanche 25 août. Nous quittons l’Herbaudière, sur la presqu’île de Noirmoutier.
Il fait très beau, mais la houle est formée et l’absence totale de vent nous contraint à naviguer au moteur. Le bateau, sans voiles, roule un peu.
En milieu de journée, Bruno nous fait remarquer que le sommet du mât de misaine est affecté de mouvements secs de droite à gauche. Tous les yeux se tournent vers le haut et Eric déclare incidemment, qu’il serait de bon ton d’arriver en Irlande avec nos deux mâts en place.
Nous constatons du jeu au passage du mât dans le pont. Nous nous attelons alors à la fabrication de petites cales en bois que nous insérons en force autour du mât, pour éliminer ce jeu. Mais le résultat est peu concluant, le sommet du mât est toujours atteint de soubresauts inquiétants.
Nous descendons dans la pointe avant, et constatons avec stupeur que le pied de mât bouge dans tous les sens de plusieurs centimètres sous les mouvements du bateau, car les boulons qui le solidarisent à la coque sont complètement desserrés !
Je me maudis, convaincu d’avoir oublié de les serrer lors de la remise en place des mâts, après le transport du bateau par la route.
Il faut alors vider le contenu de la cabine avant, où Christian et Bruno ont leurs quartiers, pour pouvoir soulever d’autres planchers et accéder aux écrous des boulons du pied de mât. Allongés, contorsionnés, ballotés par la houle et la tête en bas, Eric et moi commençons à resserrer chaque boulon, dont l’accès est difficile et se fait à tâtons.
Au bout d’un moment de ce supplice, je suis pris de nausée et doit quitter mon poste pour aller vomir mon déjeuner.
Il faut pourtant continuer, mais je me déclare inapte et impose une escale dans le port le plus proche, pour mener à bien la réparation dans des eaux calmes.
Nous nous déroutons ainsi vers Le Crouesty, où nous nous amarrons à couple avec un autre bateau. Quatre heures plus tard, les boulons sont resserrés, et nous reprenons notre route.
Je ne comprends pas comment j’ai pu oublier de serrer ces boulons.
Lors de notre étape suivante, Eric propose de contrôler également les boulons du pied de mât de la grand-voile.
Nouvelle surprise, ces boulons sont également desserrés ! Cette fois-ci, nous doublons tous les écrous par des contre-écrous, le tout bien bloqué. Merde, ça devrait tenir !
Mais je ne comprends toujours pas comment j’ai pu être aussi distrait pour oublier de serrer tous ces boulons.
Cette inquiétude quant à ma santé mentale disparaîtra, quand, lors de notre voyage retour, nous constaterons que tous les boulons, avec ou sans contre-écrous, se sont à nouveau desserrés.
Nous remplaçons tous les écrous par des écrous auto-freinés « nylstop », et cette solution va s’avérer plus pérenne.
Bien sûr, avant la prochaine navigation, j’inspecterai à nouveau tous les boulons de pied de mât…
Lors d’une précédente visite à Paradox, j’avais découvert l’existence d’un second réservoir de carburant, situé à bâbord sous les banquettes du carré. Il était de plus grande capacité que le réservoir tribord, et déjà entièrement connecté au circuit d’alimentation du moteur.
Curieusement, l’intérieur de ce réservoir était très sale. Pour le nettoyer complètement, j’ai ouvert deux trappes de visite supplémentaires dans le haut du réservoir. Avant notre départ, les deux réservoirs ont été remplis.
Rapidement, en navigation, une persistante et désagréable odeur de gasoil est apparue dans le carré.
J’ai tout d’abord soupçonné l’étanchéité des nouvelles trappes de visite, mais elles ne présentaient aucune fuite.
Par contre, le compartiment qui contient le réservoir était rempli de gasoil. Nous avons inspecté tous les raccords, toutes les conduites, mais rien à signaler de ce côté non plus.
J’en ai conclu à une fuite à une soudure, invisible bien sûr dans l’exiguïté du compartiment réservoir.
Nous avons donc fait tout notre possible pour vider ce réservoir complètement (180 litres), tant en utilisant le moteur sur celui-ci que par pompage dans des jerricans. Nous devions sans cesse pomper le carburant qui avait fui et emplissait le fond du compartiment réservoir.
Malgré l’utilisation de plusieurs produits désodorisants, l’odeur de gasoil a persisté tout au long du voyage.
Reste à identifier et éliminer la cause de la fuite. Eric émet la possibilité d’une fuite sur le circuit de retour, et ce serait trop beau. Malheureusement, si on doit réparer une fuite à une soudure, je vais devoir extirper le réservoir de son emplacement, ce qui est loin d’être une mince affaire…
A suivre…
Un panneau de voile endommagé :
Lors d’une fausse manœuvre (sans doute un empannage mal maîtrisé ?) les lattes de la grand-voile se sont un peu enchevêtrées. Un œillet d’étarquage à l’avant d’un panneau s’est arraché.
Avantage d’un gréement de jonque, un panneau endommagé n’empêche pas le reste de la voile de fonctionner !
Un autre avantage, particulier aux voiles de Paradox, est que chaque panneau de voile est indépendant et détachable du reste de la voilure.
Nous avons pu retirer ce panneau en navigation, et nous sommes déroutés sur Camaret pour faire effectuer la réparation.
Afin de gagner du temps et optimiser l’organisation, nous avons contacté par téléphone le seul artisan voilier de Camaret, lui avons expliqué le souci, et avons convenu avec lui du lieu et de l’heure du rendez-vous.
Nous avons forcé l’allure afin d’arriver dans les temps au port, et avons sollicité le service de rade pour nous amener, Eric, moi et le panneau de voile, au quai en face de l’atelier de voilerie.
Nous étions à l’heure, mais le voilier n’y était pas. Au bout d’une heure d’attente, recontacté par téléphone, il nous rétorque qu’il ne nous avait rien promis, qu’il était sur un autre chantier et qu’il s’en occuperait plus tard, s’il en avait le temps !
Dépités, nous laissons notre morceau de voile enroulé devant la porte de l’atelier, en espérant que personne ne le confonde avec un détritus à jeter, et rentrons au bateau.
Nous rageons, car nous ne souhaitions pas nous éterniser inutilement à Camaret, malgré le charme de cette petite ville.
Finalement, aux alentours de 20 heures, le bonhomme m’appelle pour me dire de venir chercher la voile réparée. Je dois longuement lui expliquer qu’il me faudra une bonne demi-heure pour contourner le port à pied et venir à son atelier, pour qu’il accepte de nous apporter le panneau au plus proche du bateau.
Je fais alors la connaissance du type, à peu près aussi cordial que la porte des sanitaires souterrains du port de Camaret…
Mais, rendons-lui cette grâce, le travail est bien fait, et pour une somme très modique.
Un proverbe en créole martiniquais illustrerait cet épilogue : « Rayi chien di dan’y blan ».
Bon, en français de la métropole, ça se traduit par « Hais le chien, mais reconnaît qu’il a les dents blanches ».
(comment je vais transposer cette idée dans la version anglaise du site, c’est une autre paire de Manches – jeu de mots involontaire !)