Samedi 7 septembre
Il est deux heures du matin sur Yvonne, le bateau de Kevin, où Eric, impatient, n’arrive plus à dormir.
Alors, n’y tenant plus, il décide de larguer les amarres pour une navigation nocturne jusqu’à Dublin.
Il navigue entre deux et trois nœuds, mais cela ne remet pas en cause son plaisir d’être seul en mer, et il arrive quelques longues heures plus tard à Poolbeg.
Les autres, qui n’ont eu droit qu’au luxe de dormir dans de vrais lits, arrivent en taxi.
La parade commencera à quatorze heures, moment où le premier des trois ponts doit s’ouvrir. Depuis onze heures, tous les bateaux sont déjà libérés de leurs amarres, et nous faisons des ronds dans l’eau au milieu de toute la flotte.
Les bateaux de toute tailles et de toute natures arborent tout leurs pavillons, Paradox a aussi sorti sa garde-robe et nous avons décoré ses filières avec des lanternes chinoises colorées.
La flottille, composée d’une soixantaine de bateaux, et la relative étroitesse de la rivière Liffey sollicitent toute notre attention pour éviter les abordages. Mais le temps est chaud et ensoleillé, et le spectacle est magnifique.
Les ponts s’ouvrent les uns après les autres : le Thomas Clarke bridge, puis le Samuel Becket bridge, et enfin le Seán O’Casey footbridge, avec sa gracieuse forme de harpe.
Nous faisons des aller-retours le long de la rivière, dont les quais sont noirs de monde, puis chaque bateau est tour à tour appelé par les organisateurs pour venir s’amarrer le long du ponton nord.
A seize heures, tous les équipages se retrouvent à bord du majestueux Leader.
La Cruising Association of Ireland y a organisé une réception très conviviale, avec brunch et boissons, au son de musiques irlandaises interprétées par un groupe de musiciens local.
C’est un super moment, occasion de rencontres et d’échanges.
La soirée se poursuit dans la bonne ambiance avec un repas du soir au Clayton Hotel, qui accueille pour l’occasion la bonne centaine de participants de la parade.
Au nom de la Junk Rig Association (L’association des gréements de jonques), je suis chargé de dédicacer officiellement un pavillon aux couleurs de l’association, que je remets au président de la CAI, en remerciement pour leur généreux accueil.
Une tradition informelle, lors des rencontres de la JRA (les « junkets »), est de remettre une bouteille de rhum à l’un des participants, généralement celui qui a effectué pour l’occasion la plus longue navigation. Sachant que nous arriverions quand-même du sud de la France, j’avais pris les devants et choisi une excellente bouteille que je pensais légitimement me décerner.
C’était sans compter sur la présence d’Alan, qui avait « juste » traversé l’Atlantique Nord sur son petit voilier Wave Rover II. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, je lui offre donc ce trophée, sous les applaudissements de l’assistance.
Après le repas, une scène ouverte est installée pour accueillir les éventuels artistes improvisés.
Dorothy et moi avions très sommairement répété 2 chansons populaires réécrites pour l’occasion par Kevin. Dorothy, experte violoniste, et moi-même, approximatif guitariste et chanteur décomplexé, interprétons d’abord « The Wave Rover », en hommage au bateau d’Alan, libre adaptation du traditionnel irlandais « The wild Rover », dont Kevin est le coupable.
Le morceau suivant est une autre adaptation, celle du célèbre « Ghost Riders in the Sky » de Johny Cash, qui, revisitée par Kevin, est devenu « Junk Riders in the Sky ».
Gina s’essaye même à interpréter « L’Hymne à l’Amour » d’Edith Piaf, accompagnée par Dorothy et moi. Le tout de manière très improvisée et imparfaite, mais le public bon enfant et indulgent n’est pas avare d’applaudissements !
Nous passerons une confortable nuit chez nos magnifiques hôtes. Bruno, Véronique et Christian chez Joe et Dorothy, Gina et moi chez Kevin et Yvonne.
Et Eric ? Il reste sur Paradox, seul maître à bord !
Un article relatant cette belle journée est disponible, en anglais, sur le site de la CAI : https://cruising.ie/three-bridges-rally-2024-report/ .